L’alcool et les médicaments

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Qu'est-ce que l'alcool ?

L’alcool (ou éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées, est une substance qui une fois ingérée peut avoir des effets sur l’organisme : baisse de vigilance, euphorie, modification de la perception du monde, vomissements, etc.

La consommation de ces boissons, qu’elle soit occasionnelle ou plus régulière, peut être à l’origine de nombreuses interactions avec vos médicaments.

On considère une consommation importante d’alcool si une personne boit :

  • Plus de 10 verres par semaine et plus de deux par jour ;
  • Plus de 5 verres à un moment donné.

A noter que la quantité d’alcool dans un verre standard est toujours la même, à savoir environ 10 grammes.

 

Source : ameli.fr

 

L’alcool ne se trouve pas uniquement dans les boissons, on peut également en trouver dans la nourriture, dans certains médicaments (sirop, gouttes buvables, etc.) ou encore dans certains produits à base de plantes.

N’hésitez pas à demander à votre pharmacien si le produit qui vous est délivré contient ou non de l’alcool.

Nous vous rappelons que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé, il est à consommer avec modération.

Quelques principes de base

Pour savoir comment l’alcool peut interagir avec vos médicaments, il est essentiel de comprendre en premier lieu ce qu’il se passe dans votre corps quand vous prenez un médicament.

Pour cela, il faut connaitre l’impact de votre corps sur le médicament (pharmacocinétique) puis l’impact du médicament sur votre corps (pharmacodynamie).

La pharmacocinétique : l'étude du devenir du médicament dans notre organisme

Quel que soit le médicament que vous allez prendre, il va subir un certain nombre étapes dites pharmacocinétiques :

 

De nombreux facteurs extérieurs, comme l’alimentation, le tabac, mais également l’alcool et la prise concomitante de plusieurs médicaments peuvent modifier chacune de ces étapes.

La pharmacodynamie : l'étude des effets du médicament sur notre organisme

En parallèle des étapes pharmacocinétiques, le médicament va avoir un ou plusieurs effets sur votre organisme, appelé effets pharmacodynamiques.

On met en évidence deux types d’effets :

  • L’effet thérapeutique:

Effet que l’on recherche quand on prend un médicament, il est bénéfique.

 

  • Effet indésirable:

Effet nocif qui peut entraîner l’apparition de nouveaux symptômes, non recherchés, auxquels on peut s’attendre ou non. L’effet indésirable est un risque lorsque l’on prend un médicament.

Lorsque vous prenez un médicament, l’objectif est d’atteindre un équilibre favorable entre les bénéfices que vous apportent le médicament et les effets indésirables qui peuvent survenir. On appelle cela la balance bénéfices/risques, elle est évaluée par votre médecin et votre pharmacien à chaque fois que vous prenez un traitement.

Comme précédemment, de nombreux facteurs extérieurs comme l’alcool peuvent potentialiser ou diminuer ces effets, qu’ils soient thérapeutiques ou indésirables.

Interactions entre médicaments et alcool

L’alcool peut interagir avec vos médicaments à chacune des étapes décrites ci-dessus, tant au niveau du devenir du médicament dans l’organisme (pharmacocinétique) que de l’effet, bon ou mauvais, qu’il produit (pharmacodynamie) ! 

Interactions au niveau pharmacocinétique

L'absorption
  • DE L’ALCOOL

Certains médicaments antidépresseurs comme l’imipramine ou la clomipramine peuvent retarder l’absorption de l’alcool et ainsi décaler l’apparition des effets délétères de l’alcool.

A l’inverse, certains médicaments comme ceux utilisés contre les nausées (métoclopramide, dompéridone, etc.) peuvent accélérer et/ou augmenter l’absorption de l’alcool et donc avancer et/ou potentialiser l’apparition de ses effets néfastes.

  • DES MEDICAMENTS

L’alcool peut causer des vomissements et donc limiter l’absorption des médicaments pris quelques heures avant. Ceci peut entraîner un risque d’inefficacité des traitements.

En fonction du médicament et dans certains cas exceptionnels, il est possible de reprendre un traitement (ex : les pilules contraceptives).

EN PRATIQUE : Comment savoir si je peux reprendre un médicament que je viens de vomir ?

Vous pouvez trouver dans la notice de certains médicaments des informations concernant la conduite à tenir si vous avez eu des vomissements dans les heures qui suivent la prise de votre traitement.

Si cette information n’est pas notée dans la notice, ne reprenez pas le médicament et prévenez votre médecin, pharmacien ou renseignez-vous auprès de « Médicament Info Service »

La distribution

A cause de la déshydratation qu’entraîne la prise d’alcool, les médicaments peuvent se retrouver en plus forte concentration dans le sang, entraînant un risque de surdosage et donc de toxicité.

C’est le cas des médicaments à marge thérapeutique étroite comme par exemple la digoxine ou le lithium.

EN PRATIQUE : Qu’est-ce qu’un médicament à marge thérapeutique étroite ?

Un médicament à marge thérapeutique étroite est un médicament pour lequel la différence la concentration sanguine minimale auquel apparaîtront certains effets indésirables est à peine supérieure à la concentration sanguine minimale pour laquelle l’effet thérapeutique apparaît.

Autrement dit c’est un médicament pour lequel une petite variation de sa concentration sanguine va le rendre soit inefficace, soit plus toxique.

Ces médicaments vont donc être d’autant plus sensibles aux facteurs extérieurs.

Pour savoir si vous prenez un médicament à marge thérapeutique étroite, renseignez-vous auprès de votre médecin, de votre pharmacien ou appelez Médicament Info Service

La métabolisation
  • DE l’ALCOOL

L’alcool est métabolisé par le foie, c’est-à-dire que le foie va modifier sa structure chimique grâce aux enzymes.

Certains médicaments (métronidazole, glicazide, kétonazole, glibenclamide, cotrimoxazole, etc.) ont la propriété de modifier la façon dont le foie va métaboliser l’alcool et ainsi entraîner l’accumulation d’un dérivé toxique de l’alcool appelé acétaldéhyde, à l’origine d’un effet dit « antabuse ».

Cet effet indésirable peut se manifester par des nausées, la tête qui tourne, des bouffées de chaleur pouvant aller jusqu’au coma et peut apparaître même pour une faible quantité d’alcool ingérée.

  • DES MEDICAMENTS

L’alcool peut aussi interagir sur la métabolisation des médicaments.

En effet une prise occasionnelle d’alcool va avoir tendance à diminuer leur métabolisation, pouvant conduire un surdosage du médicament (ex : phénytoïne, médicaments anticoagulants anti-vitamine K).

Au contraire une prise régulière/chronique d’alcool va avoir tendance à augmenter cette métabolisation des médicaments pouvant entraîner dans la majorité des cas une inefficacité du médicament (ex : phénytoïne, médicaments anticoagulants anti-vitamine K, paracétamol).

L'élimination

La consommation d’alcool a peu d’impact sur l’élimination des médicaments, néanmoins la vitesse à laquelle votre organisme va éliminer vos médicaments peut être modifiée par la prise d’alcool et peut être à l’origine d’un surdosage ou d’une inefficacité du médicament.

Interactions au niveau pharmacodynamique

La consommation d’alcool peut également agir sur les effets des médicaments en les potentialisant. Ceci peut conduire à un risque iatrogène (= conséquence néfaste d’un médicament).

  • DIMINUTION DE LA VIGILANCE

Certains médicaments, comme les antidépresseurs, les médicaments contre l’anxiété, l’allergie ou la douleur, peuvent diminuer votre vigilance.

L’alcool peut lui aussi abaisser la vigilance.

Les deux effets s’additionnent et peuvent fortement dégrader votre vigilance, exposant à un risque de chute ou encore d’accident de la voie publique.

Il est donc important de ne pas consommer d’alcool avec ces traitements.

Pour rappel, l’alcool est l’une des premières causes de mortalité sur les routes. Il est interdit de conduire avec un taux d’alcool dans le sang supérieur au seuil autorisé par le code de la route.

EN PRATIQUE : Comment savoir si mon traitement altère la vigilance ?

Vous pouvez regarder si un des pictogrammes suivant est présent sur la boite de votre médicament :

La couleur et le message vous indiquent le niveau de risque d‘altération de la vigilance.

Pour vous assurer de lire correctement le pictogramme que vous avez sur la boite de votre médicament, n’hésitez pas à consulter notre article sur « Que signifient les pictogrammes sur les boites de médicaments ? »

  • MÉDICAMENTS DU DIABÈTE

La prise d’alcool est déconseillée chez les patients diabétiques.

En effet la majorité des traitements antidiabétiques interagissent avec l’alcool en entraînant des hypoglycémies pouvant aller jusqu’au coma.

De plus, l’alcool peut masquer les symptômes de l’hypoglycémie, rendant plus difficile la prise en charge en urgence de cette complication.

  • L’HYPOTENSION ARTÉRIELLE

D’autres traitements, associés à l’alcool, peuvent causer des baisses de tension artérielle pouvant être à l’origine de chute.

C’est le cas par exemple des médicaments contre l’hypertension artérielle, la maladie de Parkinson, les troubles de l’érection, la trinitrine…

  • LA TOXICITÉ HÉPATIQUE

L’alcool peut également augmenter la toxicité hépatique (au niveau du foie) de certains médicaments comme par exemple : paracétamol, méthotrexate, duloxétine, etc…

  • L’AUTOMEDICATION

Certains médicaments disponibles en pharmacie sans ordonnance, peuvent interagir avec l’alcool, c’est le cas des anti-inflammatoires (ibuprofène, kétoprofène, aspirine) pour lesquels le mélange avec l’alcool peut aggraver les effets indésirables au niveau de l’estomac et entraîner des douleurs voir des ulcères.

Contrairement aux croyances, les produits à base de plantes (phytothérapie, aromathérapie, etc…) peuvent aussi interagir avec l’alcool et entraîner l’apparition d’effets indésirables (ex : le kudzu qui peut être à l’origine d’un effet antabuse).

Dans tous les cas, nous vous rappelons que l’alcool est dangereux pour votre santé, il est à consommer avec modération.

Que vos médicaments soient pris de façon quotidienne ou sur une courte durée, si vous souhaitez connaitre le risque d’interactions avec l’alcool,

demandez conseil à votre médecin, pharmacien ou renseignez-vous auprès de « Médicament Info Service ».

Thibault Laurent, étudiant en pharmacie

Relecture par Vanessa Gomes et Hélène Feyeux, pharmaciens